mardi 7 mai 2013

ACTIVITÉ E: L’évolution du journalisme à l’ère de l’auto-publication


À l'heure du foisonnement du Web social et de son ancrage dans tous les aspects de la vie, nombreux sont ceux qui s’interrogent sur les influences et les conséquences d’un tel mouvement effréné sur les comportements, les attitudes, les façons de faire et croyances.  Le bouleversement induit par cette vague s’accompagne à la fois d’une simplification des méthodes d’usage du Web en général et d’une sophistication des résultats (Ménard:2008), ce qui rapproche l’acteur du Web social de tous usages professionnels et pousse à une vaste démocratisation des usages dont l’expansion dans le temps est encore largement attendue. Mais ce sont surtout les impacts sur notre façon de fonctionner et nos procédés qui sont également questionnés.

Les outils gracieusement offerts par le Web social qu’ils s’appellent blogues, réseaux sociaux, Wikis restent des vecteurs puissants d’une transformation massive dont la compréhension et la philosophie en rajoutent de nombreuses dimensions et complexités à la connaissance du phénomène.  Il est alors bien pertinent de remarquer que l’ampleur du ralliement et de la participation va créer encore un certain effet massif pour toucher diversement les domaines. La certitude qui s'en dégage est qu'on mettra encore du temps et de l’énergie à en mesurer l’ampleur et le degré. Au-delà de tout, c’est toute la problématique de l’accès à l’information qui est posée et mérite un débat de plus en plus sérieux. Un des domaines qui subit des transformations radicales induites par ce mouvement est bien celui du journalisme. En effet, l'ouverture du jeu informationnel et la disponibilité de moult canaux ouverts par la socialisation du Web ont profondément occasionné un impressionnant glissement et une remise en cause de l'originalité identitaire du champ journalistique créant une tension entre auto-publication, ouverture et rigidité journalistique; une association entre statu quo et progressisme. Mais l’aspect saisissant de ce mouvement réside maintenant dans l'embarquement voire l’adaptation de nombreux acteurs qui jusque-là ont évolué dans un cadre traditionnel rigidement établi et balisé à fond par le conservatisme des normes.

Le marquage introduit par le Web social dans le secteur journalistique trouve ainsi son fondement dans l’auto-publication. Il paraît essentiel de définir ce mouvement, et d'en analyser l'évolution et les impacts possibles par une certaine mise en contexte.

L’auto-publication propulsée par le Web 2.0

L’auteur Ménard (2008) que je voudrais citer ici définit l'auto-publication sous le prisme de la liberté et y voit un double aspect à savoir l’automatisation et l’autonomie. L’automatisation renvoie aux prouesses d’Internet qui apporte à l’internaute les outils de sophistication de sa démarche. L’autonomie fait appel à la liberté et la quête de l’indépendance de l’internaute, loin des contraintes éditoriales classiques et de la rigidité introduite par le travail journalistique. Avec l’auto-publication, la publication  autrefois réservée à une caste de privilégiés du secteur informationnel a connu un vrai glissement tendant la main à de nouveaux acteurs très ambitieux, curieux et de plus en plus spontanés dans les méthodes. L’auto-publication a ainsi modifié les approches de la publication classique qui est obligée, à son corps défendant, de puiser dans le nouvel environnement des éléments de sa subsistance ou de sa survie. Ce qui implique et introduit toute l’interrogation sur son intégrité et son originalité. On ne mettra pas plusieurs années à le reconnaître, tant les facteurs et indices de ce bouleversement sont largement répandus et présents dans le nouveau contexte numérique.
L’auto-publication consacre un partage des champs et rétablit l’information dans son nouveau paysage. Il aurait été peu probable d’atteindre un tel niveau de liberté de création et de diffusion sans les outils du Web social. Comme il est difficile d’évaluer le nombre de blogues en activité les uns aussi pertinents que les autres, on peut bel et bien appréhender la portée du mouvement. Les thématiques abordées dans ces outils du Web social servent moins de compléments que de source de première main pour de nombreux utilisateurs qui s’en servent parfois comme "d’un bréviaire". Les références aux blogues, aux publications personnelles abondamment diffusées dans les réseaux sociaux se développent. Difficile de lire des travaux même scientifiques qui ne fassent aujourd’hui référence à un blogue, ce qui, il y a une vingtaine d’années aurait pu faire l’objet d’une suspicion avancée. Cette ouverture loin de mettre en péril le journalisme annonce des perspectives très mitigées pour les médias de masse traditionnels (radio, télévision, journaux) et contribuera à brouiller les cartes au point d’amener les acteurs médiatiques classiques à se redéfinir et à trouver un nouveau positionnement qui les livrerait moins aux effets des réseaux sociaux et des logiques qui les accompagnent. 

De la multiplication des sources d’information

Une façon d’appréhender l’impact du développement du Web 2.0 sur le travail des médias se mesure à l’aune de la disponibilité des sources d’information dont la circularité prend une dimension de plus en plus importante, à mesure que les adeptes du Web social s’emparent des outils qui leur sont offerts.
Les journalistes dans leur rédaction font ainsi désormais face à une foule d'informations provenant de sources d’information différentes, les unes aussi contradictoires que les autres, mais que le journaliste doit réussir à dépouiller. La disponibilité constante et en quantité presque industrielle de l’information  est une conséquence de l’émergence et de l’établissement des réseaux sociaux. Alors que les rédactions de médias étaient assujetties jusqu’à une période récente à des sources classiques que sont les grandes agences de presse dont les plus courues sont Reuters, l’AFP et AP, les temps sont presque révolus. À une certaine époque ces grandes agences bénéficiaient de l’attention des utilisateurs médiatiques, pendant que les petites agences intermédiaires pouvaient être frappées d’un certain manque de crédibilité. Aujourd’hui, même le plus petit blogue, animé par l’internaute lambda peut bénéficier d’une certaine audience auprès des professionnels de l’information. Et tous les motifs de questionnement se situent justement à ce niveau. Car l’esprit révolutionnaire de certains acteurs s’expose à ce vaste mouvement de libéralisation informationnelle. Ce qui présente pour certains avant-gardistes le risque de contamination de l’espace journalistique et pourrait porter atteinte à ses franchises et son intégrité.
Mais quelles que soient les positions défendues, le débat est et restera pendant longtemps en discussion. Inutile de penser qu’une concession se dégagera forcément autour d’une telle réflexion qui va se poursuivre encore au point de révéler au fur et à mesure de l’évolution des facettes cachées voire des nuances.Une interrogation qui surgit justement à l’observation de ce contexte de foisonnement des médias sociaux c’est la façon dont les acteurs informationnels réagissent ou vont continuer à le faire dans le flot d’informations qui se présentent à eux. Car ce n’est vraiment pas facile de distinguer le vrai du faux dans un tel climat, pas plus qu’il n’avait pas été facile, au moment où le Web social n’était pas développé, de mesurer la pertinence d’une dépêche de Reuters et de l’AFP abordant le même sujet, envoyée au même moment, mais avec des développements différents, des citations différentes. On comprend bien donc que le Web social est un couteau à double tranchant qui tout en allégeant la tâche sur une grande accessibilité va complexifier la donne par l’incertitude qu’il instaure et le piège qu’il tend en constance au travail journalistique. La pureté existe-t-il encore dans le champ des médias de masse? Hier, la réponse était non avec la prolifération des sources traditionnelles, et aujourd’hui avec l'abondance des réseaux, il est encore plus facile d’y répondre par la négative.

Une démocratisation de l'interprétation des faits

Dans la théorie journalistique, l'agenda-setting constitue un pilier majeur de compréhension des effets directs de l'information sur le public et les interprétations qui en ressortent.  Théorie inventée en 1972 par les universitaires McCombs et Shaws pour montrer l'influence des médias sur l'opinion publique, l'agenda-setting revient à dire que les médias n'orientent pas la pensée ou l'opinion des gens, mais les orientent vers les événements sur lesquels ils doivent concentrer leur attention. Les médias de masse sont illustratifs de cette théorie. Du coup, cette théorie établie une relation entre la hiérarchie des faits et la hiérarchie de leur signification. 

Les médias sociaux procèdent presque de la même façon, par l'entremise de l'économie de l'attention. Ils vont alors mettre en vedette des sujets importants sur lesquels ils voudraient que des échanges s'organisent et que les intérêts se forment. C'est ce que nous verrons à travers le ciblage des sujets qui barrent la Une de certains blogues ou par l'entremise des publications retrouvées dans certaines pages personnelles. 

Mais le fait nouveau réside dans le fait que cet agenda de l,auto-publication s'accompagne d'une démocratie de l'interprétation qui n'est plus seulement une imposition des médias de masse. Car il faut comprendre que la hiérarchie des faits par le journalisme indique forcément l'opinion que les acteurs qui gravitent autour s'en font et qu'ils voudront imposer au public. C'est un inversement de regard et d'attitude qu'introduisent ainsi les réseaux sociaux. Chacun se fait son idée de tel sujet mis en débat, et par le jeu de l'interaction que permet le Web 2.0 les spécialistes et autres chroniqueurs voire commentateurs cessent d'être les seuls détenteurs de la vérité. Chaque internaute y va alors de sa compréhension et de sa contestation.     

La twittosphère: un vrai catalyseur

Les sources les plus fréquemment utilisées par les journalistes dans les rédactions de télévision et de radio sont surtout les blogues et le réseau social Twitter. D'ailleurs des cours entiers sont régulièrement prodigués aux jeunes journalistes sur l'utilisation de Twitter comme source d'information. Cette tendance n'est guère surprenante, car beaucoup de professionnels d’information journalistique voient notamment dans Twitter un côté plus professionnel et plus sécuritaire dans la gamme des outils sociaux. Ils y voient notamment un outil au service de l’identité professionnelle des groupes diffusant des informations sérieuses, utiles, dénuées de toute la fantaisie et du populisme remarqué dans d’autres outils du Web social comme Facebook. En raison de cet avantage psychologique, il est clair et évident que les journalistes vont beaucoup s’abreuver à la source de ce média social. Ils concentreront leurs efforts là-dessus lors de grands événements, de grandes crises, de grands discours. Beaucoup vont alors s’y appuyer pour rédiger des articles, des dossiers qui nécessitent un grand développement et une diversité de sources et d’intervenants. La conscience du groupe qui émerge du Web social poussera les journalistes à se faire confiance entre eux dans un réseau comme Twitter et à relayer parfois les informations publiées par les éléments de leurs groupes, avec pour certains des precautions liminaires voire sommaires afin de se donner bonne conscience. Twitter en rajoute à l’instantanéité journalistique et vient accompagner l’envie du journalisme à l’heure des réseaux sociaux d’aller plus vite au travers des propres usages des acteurs médiatiques.


Mutations à court terme du journalisme sous la pression des médias sociaux 

Avec les développements autour des usages des médias sociaux par les journalistes et l’effet d’envahissement des outils sociaux, il va de soi que le mouvement va rapidement se répéter au cours des prochains mois. De plus en plus de journalistes sont inscrits dans les réseaux sociaux, sources potentielles d’information. D’autres résistent encore à le faire pour protéger davantage leur territoire ou par conservatisme rigide. Mais pour beaucoup la résistance ne durera pas longtemps encore. Prenons l’exemple de Twitter, il y a un an, certains de mes collègues s’en étaient écartés, y voyant un outil de loisirs dénué d’un grand sérieux. Un an après, non seulement ils ont rejoint les rangs des utilisateurs, mais ont pris goût à d’autres réseaux « moins professionnels ». Il y a lieu d’y voir tout simplement une tendance, un effet d’entraînement qui loin d’être décalé est en conformité avec le contexte. De cette façon, il faut vraiment s’attendre à ce que les retardataires commencent à prendre le train au cours des prochains mois, car comme souligné plus haut, ils y verraient de potentielles sources d’information et des lieux de partage d’idées et d’expériences susceptibles de suggérer à des reporters, chroniqueurs et animateurs des idées pour leurs productions.
À mon avis, un réseau comme Facebook, quoique populaire jouera un rôle de poids dans cette conquête. Combien ne sont-ils pas à l’heure actuelle les médias qui s’y disputent une place : qu’ils soient de grands médias nationaux ou des médias internationaux. Le plus important est de s’en servir comme prolongement de l’audience.

Cette tendance va se comprendre, car les médias sont de plus en plus à la recherche d'une popularité et il semblera normal pour eux d’aller chercher ou fidéliser des adeptes dans des cercles populaires. Autrement, l’objectif des médias est d’aller atteindre des niches systématiquement en explorant des endroits qui s’y prêtent. Le caractère interactif des médias sociaux devrait ainsi permettre aux médias traditionnels de puiser dans les discussions des ressources qui assureront leur survie. De ce point de vue, on n’exagère rien en voyant les médias sociaux comme des éléments de survie des salles de nouvelles, au travers de leurs acteurs qui s’y rabattront.
C’est aussi un autre endroit où la compétition va se jouer entre les médias. Comme ils veulent atteindre les niches, l’intention qui sous-tend cette volonté est d’être le meilleur auprès du public. Du coup une forte présence dans les médias sociaux va intensifier la compétition et la visibilité des contenus diffusés. Il y a à ce niveau une double perception à rapporter. D'une part, la vitesse des médias sociaux est déjà en compétition avec les médias classiques. D'autre part, ces derniers voudront se servir encore de ces médias sociaux pour s’assurer une certaine place et se donner une épaisseur qui autrement risque de s’évaporer rapidement. Ce seul aspect montre à quel point les acteurs classiques de l’information appréhendent l’enjeu de l’auto-publication que permet le Web social et la déconstruction qu’elle provoque dans le fonctionnement et la conception du fait journalistique.

Les médias d’information, animés par la folle course à l’information dans une concurrence de plus en plus poussée, vont surtout écoper tant dans la philosophie qui les marque que leurs rapports aux médias sociaux.

La déconstruction de la démarche journalistique sous la pression des blogues : effet à moyen terme

L’information journalistique n’est pas un fait brut, car elle fait l’objet d’un travail dont seul le journaliste maîtrise les rouages et les subtilités. De ce point de vue, il y a une distinction nette à établir entre l’information collectée et l’information diffusée ou publiée. Car au milieu du processus, il y a tout un travail qui exige rigueur, précision, sélection. Bref, une démarche critique de hiérarchisation et de sélection s’impose au travail du journaliste. C’est aussi l’assurance que le travail journalistique répond à tous ces critères qui expliquent toute la confiance que lui fait le public et assure sa permanence.
C’est cette rigueur journalistique que vient littéralement modifier voire inverser l’environnement des médias sociaux avec l’arrivée de nouveaux acteurs qui disposent des mêmes outils, parfois plus sophistiqués.
L’auto-publication bouscule les règles du journalisme, et ce, pour diverses raisons. Le public de l’auto-publication et celui du journalisme peut désormais se recouper. Ainsi pour être dans la compétition, le journalisme est obligé de modifier ses règles et principes sans forcément le vouloir- pour s’adapter à la logique des acteurs présents dans le champ de l’auto-publication. Ce développement introduit fort bien la différence sans cesse évoquée entre le blogueur et le journaliste pour souligner le caractère amateur de l’un et le côté professionnel de l’autre. Mais la généralisation des blogues et la compétition qu’ils inaugurent force, à moult égards, poussent le journalisme à adoucir sa rigueur. L’illustration se trouve dans la diffusion sans précaution par les médias traditionnels de certaines nouvelles lors des catastrophes et autres événements de grande envergure. Lors des derniers attentats de Boston, la crainte de se faire dépasser par les médias sociaux a poussé de grands journaux comme le New York Times à publier des photos de faux suspects, cédant ainsi à la pression des nouveaux médias. Il a fallu se rendre à l’évidence de cette erreur pour rectifier le tir après coup.
Les exemples de ce type abondent et démontrent avec satiété la pression qui repose sur les épaules du journalisme pris dans le tourbillon de l’auto-publication. Si auparavant les consommateurs des médias n’avaient d’oreilles et d’yeux que pour les canaux classiques que forment la radio et la télévision classique pour s’informer, la blogosphère a démontré sa gourmandise dans la nouvelle donne. Car là où les médias classiques vont chercher à sélectionner les histoires qui les intéressent avec le risque de laisser en rade une portion de consommateurs, les blogues vont s’intéresser à tout.
Au cours des prochaines années, les médias vont tenter de réoccuper l’espace conféré aux nouveaux médias par différents mécanismes de reconquête.
Une des nombreuses façons résidera dans ce qui s’observe actuellement et qui va se développer davantage à savoir le changement d’attitude dans la démarche de traitement et de présentation de l’information guidée par l’instantanéité. À des exceptions près, les médias, notamment les chaînes d’information continue sont exposés aux transformations décrites. Car pour être au goût du jour et ne pas se faire dépasser par la concurrence des autres médias, ils voudront se passer des filtres traditionnels qui leur confèrent l'identité de rigueur dont ils sont si fiers actuellement. Les lignes et frontières éditoriales se brouilleront sous l’effet et la pression des médias sociaux.
En raison de la forte réputation de certains blogues, des médias pour s’assurer une réputation seront amenés de plus en plus trouver à renforcer une tendance qui s’observe actuellement à savoir les « trackback » et les flux RSS pour s’enticher de la célébrité et du succès des blogues et de leurs auteurs. L’envie de s’associer aux succès de la blogosphère va davantage conduire les médias à développer des blogues de journalistes-vedettes sur leurs sites Web en vue de contrer la compétition emmenée par des internautes indépendants. Cette vogue est appelée à se renforcer ou à se généraliser. Un changement qu’induiront plus encore, à moyen terme, les médias sociaux, se situera dans l’emprunt à ceux-ci par la télévision et la radio de certains de leurs outils les plus efficaces. Ainsi les fils d’information sur les sites Internet de plusieurs médias s’appuient actuellement sur Twitter, avec la possibilité donnée aux journalistes de rapporter en direct, par écrit, des faits de façon instantanée et au moment où se produit un événement. Cette tendance va évoluer et deviendra presque un modèle additif de diffusion dans les médias.



Fil twitter de nouvelles Radio-Canada

Les moyens de collecte ou de cueillette de l’information s’en trouveront également marqués. Si jusqu’ici les méthodes de collecte classiques continuent d’avoir voix au chapitre avec un appel sommaire aux nouveaux médias, les prochaines années vont certainement accélérer le mouvement. Car la conduite d’entrevues par Skype, Facebook et d’autres outils populaires par les journalistes deviendront la règle. Pour de nombreuses rédactions aux moyens limités, cette solution permettra probablement de régler un problème économique, en ce sens que des outils sociaux leur permettront d’avoir à la fois texte, son et vidéo. D’ailleurs, on ne se trompera guère en avançant qu’un outil comme You tube permettra encore, à un rythme accéléré, à des médias de régler l’équation d’acquisition d’archives pour illustrer leur travail.
Cette façon de fonctionner s’observe actuellement dans de nombreux médias, mais la tendance va probablement se généraliser à un moment où la crise des médias prend de l’ampleur. D'ailleurs certains médias, comme Reuters, l'ont compris et s'efforcent actuellement de tracer des lignes à ne pas franchir.
Mais ces bouleversements ne sont qu’une introduction à des mutations plus profondes qui interviendront à long terme et qui pourraient sonner le glas du journalisme ou le dénaturer littéralement. 

La formation journalistique encaissera le coup à long terme

Il y a une trentaine d’années, ceux qui n’avaient jamais pris par une école de journalisme avaient la frustration d’entrer dans la profession et trouvaient même après plusieurs années de pratique les moyens d’aller se faire former dans une école de journalisme. Au fur et à mesure de l’évolution des pratiques journalistiques, le mythe de l’école a connu une chute réelle au point où n’importe qui, à condition d’en avoir les aptitudes, pouvait exercer le métier. Si le mythe des années 70-80 était celui de la formation journalistique, celui des années 2000 s’apparente à la maîtrise du numérique et des réseaux sociaux. Ainsi le constat qui suit montre très bien que plusieurs personnes exercent la profession journalistique sans avoir passé une journée dans une école. Le phénomène est tant et si bien admis que de moins en moins l’exigence de scolarité journalistique est évoquée. L’essor de la blogosphère a aussi contribué à cette évolution psychologique du contexte, plusieurs aspirants voyant dans le succès des blogues une bonne façon aujourd’hui de se passer des arguments de la formation.
De nombreux concours dédiés aux journalistes sont ouverts aux blogueurs qui y vont parfois avec les mêmes arguments, sinon plus, que les journalistes. À l’observation de tout cela, c’est toute une conception d’époque qui s’écroule.
La formation de journaliste aura de moins en moins d’importance. La facilité que chacun a à jouer avec les médias sociaux, à publier, à s’offrir une satisfaction voire parfois un gain pécuniaire s’accompagnera d’un délaissement du champ de la formation. Un phénomène qui a cours actuellement va se généraliser au cours des deux prochaines décennies. À cette allure, les écoles de formation journalistique vont modifier leur curriculum pédagogique. Car on le voit bien les centres les plus visionnaires ont des spécialités complètes en médias sociaux, dans le but de former des « journalistes » qui contreront la vague des adeptes de l’auto-publication. Mais lorsqu’on observe de plus près, même le travail de ces spécialistes formés dans l’usage journalistique des médias sociaux, il est évident que leur approche n’est pas bien loin de celle des néophytes qu’ils entendent combattre. Cela souligne à satiété la façon dont l’auto-publication mène la barque journalistique. Et cette cooptation va se préciser davantage d’ici une vingtaine d’années encore pour nous montrer à quel point le journalisme, même s’il ne disparaîtra pas va encaisser énormément le coup.

Référence citée 

Marc Ménard, "Les conséquences économiques de la diversité culturelle", david contre Goliath: La Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l'UNESCO, Montréal: Éditions Hurtubise HMH, 2008, p. 51-73

http://communicationtermsfr.fcj.wikispaces.net/Agenda+setting+theorie, lien consulté le 07 mai 2013

Site Web Radio-Canada Saguenay-Lac- Saint-Jean

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